Es sue dès Schly

Es sue dès Schly

JE SUIS DE SILLY – DE GÉRARD CRUSIAU

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J’im souvie faure bie qu’demme jonne âge

Je me souviens fort bien que dans mon jeune âge

J’astou aussi scaffe quès les auts gamins du village

J’étais aussi turbulent que les autres gamins du village

C’est ni qu’jastoû mau alvé

Ça n’est pas que j’étais mal élevé

Mais je n’savoû nie lèchie tranquille ni biète ni gés

Mais je ne savais pas laisser tranquille ni bêtes ni gens

A scolle quate joues par semaine j’astoû puni

A l’école quatre jours par semaine j’étais puni

El maite a tout fait pou m’rassagî

Le maître à tout fait pour me rassagir 

Et gandichant, ej n’ai nie canjie

En grandissant, je n’ai pas changé

J’em su mis a couri au cul des filles

Je me suis mis à courir au cul des filles

A 18 ans les gés disint t’é parlant d’mi

A 18 ans les gens disaient en parlant de moi

Jemme demand’ usqu’è s’illa va fini

Je me demande ou est-ce que celui-là va finir

Mais l’cé vi toudi aveu l’âge

Mais le sens (le bon sens) vient toujours avec l’âge

J’essu dev’nu branmé pu sage

Je suis devenu beaucoup plus sage

Yest mennan pu qu’jamais esch tie à l’village

Et maintenant plus que jamais je tiens au village

Si essue co aujord’hu d’oussi

Si je suis encore aujourd’hui ici

C’est pasqu’avant tout… Es sue dès Schly

C’est parce qu’avant tout… Je suis de Silly

 

Quand ça s’té pou rétré à l’armée

Quand ça a été pour rentrer à l’armée

Aveu tous les camarades d’em année

Avec tous les camarades de mon année

Nos astons d’allé au Conseil de Révision

Nous sommes allés au Conseil de Révision

Nos moustrés tout nu sans scançon

Nous montrer tout nu sans caleçon

Et no veyant ési costumés

En nous voyant ainsi costumés

Mi j’rious sans m’arrêter

Moi je riais sans m’arrêter

Quand veyant çà, in viel major s’erlief est vie sur mi

Quand voyant cela, le vieux major se relève et vient sur moi

M’ramasse pas l’espale yest il dit :

Me ramasse (m’attrape) par l’épaule et il dit :

« Vous n’avez donc jamais rien vu

Ici il faut garder le silence absolu.

Je me demande d’où vous sortez espèce d’abruti ! »

J’li ai respondu : « Mi ? S’sue de Schly »

Je lui ai répondu : « moi ? Je suis de Silly »

 

Les gés d’menant n’palté pus que d’voyages

Les gens de maintenant ne parlent plus que de voyages

Pourmener in sac su l’un dos, ou bie n’valise pleine dès bagages

Promener un sac sur leur dos, ou bien une valise pleine de bagages

On fait l’autostop ou du fouting

On fait de l’autostop ou du footing

Ou bi camping

Ou bien (du) camping

Puisqu’i fait bon pusqu’on va long

Plus il fait bon plus on va loin

Volant fait comme les autes, j’ess’ue d’allé pren l’air

Voulant faire comme les autres, je suis allé prendre l’air

J’ai sté m’pourmené, tout in joûe à Isières

J’ai été me promener tout un jour à Isières

Mais v’la qu’au nût, j’nertrouvoû pu m’quemin

Mais voilà qu’à la nuit, je ne retrouvais plus mon chemin

Jum dis : « Ça yet j’va manquî m’train »

Je me dis : « Ça y est je vais manquer mon train »

Veyant un homme qui sarqueloû ses ougnons

Voyant un homme qui sarclait  ses oignons

J’li dis : « Héh mossieur, ell’route pou l’estation ? »

Je lui dis : « hé, monsieur, la route pour la station ? »

Et m’étedant dvisé i serlief, y vi d’lé mi

En m’entendant parler il se relève, il vient près de moi

Et m’ravisant im dit : « Vous vos n’ête nié det parchi »

En me regardant il me dit : « Vous vous n’êtes pas de par ici »

J’ai respondu : « Non, mi es sue de Schly »

J’ai répondu : « Non, moi je suis de Silly »

 

A Bruxelles y faut fait attention

A Bruxelles il faut faire attention

In non pu in win c’enn contravention

Pour un non pour un oui c’est une contravention

Despû qu’el gouvernement a dangie d’yards

Depuis que le gouvernement a besoin d’argent

Les agents d’police verbalis’t à tout hasard

Les agents de police verbalisent à tout hasard (à tout va)

C’est aissi qu’é astant l’aut’ joûe et n’automobile

C’est ainsi qu’en étant l’autre jour en automobile

J’èrmontou l’Botanique et suivant l’file

Je remontais le Botanique  en suivant la file

Tout d’in quau, v’la’ l’feu rouge qui s’alleume

Tout d’un coup, voilà le feu rouge qui s’allume

E lvoiture ded’vant mi pilotée par n’ feume

La voiture de devant moi pilotée par une femme

Donne in quau d’frein à tout squetté

Donne un coup de frein à tout casser

Yès mi sa yè, j’sus retré d’vé

Hé moi ça y est, je suis rentré dedans

In policier l’chufflot à s’bouche

Un policier le sifflet à sa bouche

Fonce dessu mi d’in air farouche

Fonce sur moi d’un air farouche

Y baraguine étré ses dés

Il baragouine entre ses dents

Après ça im dit : « Vous m’avez compris ? »

Après ça il me dit : « Vous m’avez compris ? »

J’ai respondu : « Non, fieu  ! Mi sue des Schly ! »

J’ai répondu : « Non, gamin ! Moi je suis de Silly ! »

 

I da qui vos dit’è qu’la vie est pleine dè plaisis

Il y en a qui vous disent que la vie est pleine de plaisirs

Tout ça dépend si l’chance vos souri

Tout ça dépend si la chance vous sourit

Pou gagnî des yards on frout tout

Pour gagner de l’argent on ferait tout

Même erlequî l’burre ju dess’tartine pour r’venne les croutes

Même lécher le beurre en bas de ses tartines pour revendre les croûtes

On pré des billets d’tombola à tire-larigot

On prend des billets de tombola à tire-larigot

Pou risquî d’attraper l’gros lot

Pour risquer d’attraper (avoir la chance de gagner) le gros lot

C’est eissi qu’laut joûe à l’ lotrie

C’est ainsi que l’autre jour à la loterie

J’avoû gagnie in jonne dè tchie

J’avais gagné un jeune de chien

J’astou bie émerdé aveu l’biette

J’étais bien emmerdé avec la bête

J’em demandoue usse qu’est j’daloue l’mette

Je me demandais où est-ce que j’allais la mettre

Mais n’brave feume qui astou doulà

Mais une brave femme qui était là

Eyant vu d’vé l’gazette què no reine aimoue ces quadripèdes là

Ayant vu dans la gazette que notre reine aimait ces quadrupèdes là

Emm’dit « Mossieur, dounel mè lè pou Fabiola

Elle me dit : « Monsieur, donnez-le-moi pour Fabiola

Esch’su bie seure què ça li fra plaisi

Je suis bien sûre que ça lui fera plaisir

D’ailleur, dounemme vo n’adresse pou li vo dire merci »

D’ailleurs, donnez-moi votre adresse pour qu’elle vous dise merci »

J’li ai respondu : « Mi es sue de Schly »

Je lui ai répondu : « moi je suis de Silly »

 

Eun vie su l’terre on n’da foque eune

Une vie sur terre on n’en a seulement qu’une

Malheureus’mé elle est bouversée pa les feumes

Malheureusement elle est bouleversée par les femmes

In grand penseur nommé « Jean sans peur »

Un grand penseur nommé « Jean sans peur » 

A écrit ces vers què j’ai rtenu par coeur :

A écrit ces vers que j’ai retenu par coeur

« La vie est un désert qu’il nous faut traverser

« La vie est un désert qu’il nous faut traverser

C’est la femme el’chameau qui nous aident à l’passer »

La femme est le chameau qui nous aident à le passer »

Après ça c’est la fin

Après ça c’est la fin

Nos rallons d’vé l’terre à gardins

Nous retournons dans la terre à jardin

Mi quand j’sarai rappelé pou l’éternité

Moi quand je serai rappelé pour l’éternité

C’est d’vé l’cimetire dès Schly que j’vérré d’morer

C’est dans le cimetière de Silly que je viendrai rester

J’em voû d’jà arriver au Paradis

Je me vois déjà arriver au Paradis

St Pierre réajustant ses lorgnons

St Pierre ré-ajustant ses lorgnons

Emm dire : « Camarade, vo compte est bon

Et me dire : « Camarade, votre compte est bon

Vos papies n’sont nie fore en orde pou rétré doûci

Vos papiers ne sont pas fort en ordre pour rentrer ici

Im chann qu’è d’su l’terre, vos avez eu n’masse du plaisi ! »

Il me semble que sur la terre, vous avez eu beaucoup de plaisir ! »

Mais à ça l’li respondré :

Mais à ça je lui répondrai :

« Qu’au volé St Pierre, Mi j’vî dès Schly »

« Que voulez(-vous) St Pierre, moi je viens de Silly »